S'informer
Lorsqu’un édifice présente un danger (risque d’effondrement par exemple), le maire, dans le cadre de ses pouvoirs de police administrative, a le devoir de remédier à cette situation pour protéger la sécurité des personnes.
Toute personne qui suspecte un danger en fait la déclaration à la mairie qui, après visite, peut initier une procédure de mise en sécurité (anciennement péril), ordinaire ou d’urgence. Le Code de la construction et de l’habitation réglemente cette procédure aux articles L 511-1 à 22 et R 511-1 à 13.
Qu’est-ce qu’un immeuble menaçant ruine ?
Un immeuble menaçant ruine est un immeuble dont les murs, bâtiments ou édifices présentent des risques n'offrant pas les garanties de solidité nécessaires à la sécurité des occupants de l’immeuble ainsi qu’aux tiers (CCH, art. L511-2).
Le risque doit émaner exclusivement ou de manière prépondérante de l’immeuble. La jurisprudence a également posé que le danger devait être réel et actuel.
Peuvent ainsi justifier le déclenchement de la procédure de péril : un immeuble qui s’effondre, une chaudière collective d’un immeuble qui menace d’exploser, un immeuble qui comporte des revêtements dégradés contenant du plomb susceptible d’intoxiquer une femme enceinte ou un mineur.
Face à une telle situation, le maire qui n’enclencherait pas une procédure de péril pourrait voir sa responsabilité administrative mais également pénale, soulevée. A titre d’exemple, la responsabilité pénale d’un maire a été engagée par suite de l’effondrement d’un mur mitoyen d’un magasin désaffecté sur une véranda, blessant grièvement un enfant et plus légèrement onze autres convives (Tribunal correctionnel de Valenciennes, 15 avril 2015).
Bon à savoir : la législation des immeubles menaçant ruine s’applique également aux édifices ou monuments funéraires dans les cimetières (CCH, art. L. 511-3).
Qui doit signaler un immeuble dangereux et comment ?
Toute personne (un passant, un ami, un voisin, un futur acquéreur, un locataire etc.) ayant connaissance d’une situation de danger la signale à l’autorité compétente (CCH, art. L. 511-6) qui est :
- Le maire de la commune de situation de l’immeuble (CCH, art. L. 511-4)
- Le préfet de police, à Paris, et seulement pour certains immeubles (CCH, art. L. 511-5).
En cas de danger imminent, il est recommandé d’appeler les pompiers.
Quelles sont les étapes de la procédure de mise en sécurité ?
La situation de péril doit être constatée et évaluée
- La visite
Afin d’évaluer les risques, le maire peut faire procéder à toutes visites qui lui paraissent utiles (CCH, art. L. 511-7).
Lorsque les lieux sont à usage total ou partiel d'habitation, les visites ne peuvent être effectuées qu'entre 6 heures et 21 heures,
En cas de désaccord de l’occupant ou en l’absence de réponse, une autorisation du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire sera nécessaire pour visiter les lieux.
- Le rapport de situation
A l’issue de la visite, les services communaux compétents établissent un rapport de situation qui est remis au propriétaire du bien (CCH, art. L511-8).
Le maire apprécie le niveau de danger et opère un choix entre deux procédures :
- la procédure de péril ordinaire lorsque le danger n’est pas immédiat ;
- la procédure de péril imminent lorsque la situation justifie une intervention très rapide.
- L’expertise
Préalablement à l’adoption de l’arrêté de sécurité, le maire peut demander à la juridiction administrative la désignation d'un expert afin qu'il examine les bâtiments, dresse constat de leur état y compris celui des bâtiments mitoyens et propose des mesures de nature à mettre fin au danger. L'expert se prononce dans un délai de vingt-quatre heures à compter de sa désignation (CCH, art. L511-9).
Si le rapport de l'expert conclut à l'existence d'un danger imminent, le maire peut enclencher la procédure d’urgence (CCH, art. 511-19 à 21).
En cas de péril ordinaire : procédure contradictoire (CCH, art., L511-10 à 18)
- Une procédure contradictoire
Une procédure contradictoire est engagée avec la personne tenue d’exécuter les travaux.
Concomitamment, les occupants sont informés de la mise en place de cette procédure.
- L’arrêté de mise en sécurité
Le maire adopte un arrêté de péril (ou arrêté de mise en sécurité), par lequel il peut prescrire la réalisation de différentes mesures et dans le délai qu’elle fixe (CCH, art. L. 511-11) :
o La réparation ou toute autre mesure propre à remédier à la situation,
o La démolition de tout ou partie de l'immeuble ou de l'installation,
o La cessation de la mise à disposition du local ou de l'installation à des fins d'habitation,
o L'interdiction d'habiter, d'utiliser, ou d'accéder aux lieux, à titre temporaire ou définitif.
L'arrêté de mise en sécurité est notifié à la personne tenue d'exécuter les mesures (CCH, art L. 511-12).
- Les mesures et travaux ordonnés
- Si le propriétaire effectue les travaux demandés, dans les délais, alors l'achèvement des travaux prescrits par l'arrêté est constaté ainsi que la date d’achèvement. (CCH, art. L. 511-14). Une mainlevée est prononcée. L’interdiction d’habiter est levée, les locataires peuvent de nouveau accéder aux habitations.
Bon à savoir : l’arrêté de mise en sécurité ne peut pas être levé avant la réalisation des mesures prescrites. L’autorité compétente peut en revanche modifier l’arrêté pour pouvoir prononcer la main levée (Rép. min. n° 07571 : JO Sénat Q 28 sept. 2023).
- Le propriétaire peut également se libérer de ses obligations par la conclusion d’un bail à réhabilitation, d’un bail emphytéotique ou d’une vente en viager, à charge pour les acquéreurs d’effectuer les travaux (CCH, art. L511-14).
- Lorsque les travaux n’ont pas été réalisés dhttps://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000042338251ans le délai fixé :
o la personne tenue de les réaliser est redevable d’une astrhttps://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000042338251einte dont le montant est fixé par le maire mais ne peut dépasser 1.000 euros par jour de retard (CCH, art. L. 511-15).
o Le maire peut faire procéder d’office à l’exécution des travaux, aux frais du propriétaire. Il peut faire procéder à la démolition prescrite sur jugement du président du tribunal judiciaire (CCH, art. L511-16).
En cas de péril imminent : la procédure d’urgence (CCH, art L. 511-19 à 21)
En cas de danger imminent, que l’imminence soit manifeste ou constatée par le rapport d’expertise ou le rapport de situation, une procédure d’urgence peut être engagée et ce, sans contradictoire avec le propriétaire :
- La mairie a donc le pouvoir d’ordonner par arrêté les mesures indispensables pour faire cesser le danger et ce dans le délai qu’elle fixe.
- Lorsqu'aucune autre mesure ne permet d'écarter le danger, l'autorité compétente peut faire procéder à la démolition complète après y avoir été autorisée par jugement du président du tribunal judiciaire.
- Si les travaux ne sont pas effectués par le propriétaire dans le délai imposé, la mairie a également le pouvoir de les exécuter d’office, aux frais du propriétaire (CCH, art. L 511-20).
- Si les mesures ont mis fin durablement au danger, l'autorité compétente prend acte de leur réalisation et de leur date d'achèvement. Elle prend un arrêté de mainlevée (CCH, art. L 511-21, al.2).
- Dans le cas contraire, le maire poursuit la procédure ordinaire (CCH, art. L 511-21, al. 1).
Les risques auxquels s’expose le propriétaire qui n’effectue pas les travaux
Le propriétaire qui refuse d’effectuer les travaux s’expose :
- Au paiement d’une astreinte pouvant aller jusqu’à 1.000 euros par jour de retard et due à compter de la notification de l’arrêté la prononçant (CCH, art. L511-15) ;
- A ce que les travaux soient exécutés d’office et à ses frais ;
- A une peine d’un an d’emprisonnement et d’une amende de 50.000 euros dès lors que son refus d’exécuter les travaux et mesures prescrits, est délibéré et sans motif légitime. Lorsque les occupants est une personne vulnérable, notamment un ressortissant en situation irrégulière, la peine est fixée à deux ans d’emprisonnement et 75.000 euros d’amende (CCH, art. L511-22).
Le recours contre un arrêté de mise en sécurité
Il est possible au propriétaire concerné de contester l’arrêté, dans le délai de deux mois.
Il lui est ainsi possible d’exercer un recours administratif gracieux ou hiérarchique (Code des relations entre le public et l’administration, art. L 411-2) :
Il lui est également possible et dans le délai de deux mois de contester un arrêté ordinaire et depuis 2020, un arrêté d’urgence devant le président du tribunal administratif (CJA, art. R222-13, 8°).
Le juge va ainsi contrôler l’applicabilité de la procédure, les règles de forme et de procédure ainsi que le fond de l’arrêté (existence du péril, menace sur la sécurité…). Il peut ainsi rejeter le recours, annuler l’arrêté (à condition que la demande ait été formulée) ou le modifier. Le jugement doit alors être exécuté.
Il est possible de faire appel de ce jugement devant la cour administrative d’appel (CJA, art. R811-1). De même, le pourvoi en cassation porté devant le Conseil d'État est ouvert à l'encontre de l'arrêt de la cour administrative d'appel
Bon à savoir : depuis 2020, la procédure de contestation d’un arrêté de mise en sécurité d’urgence (ancien arrêté de péril imminent) a été alignée sur celle d’un arrêté ordinaire ; Il peut également être contesté devant le président du tribunal administratif, en plein contentieux : le juge apprécie l’existence d’une urgence ou de l’imminence du danger au jour où il statue (CE, 23 déc. 2020, n°431843, Cne Régny).