La consignation dans les procédures d'expropriation et préemption

Mis à jour le Lundi 24 juin 2024

L’expropriation et la préemption sont des procédures complexes qui permettent à une collectivité publique (la mairie par exemple) d’acquérir un bien immobilier dans l’intérêt général. Quand le paiement du propriétaire soulève des obstacles, il peut être nécessaire de procéder à la consignation du prix du bien exproprié ou préempté.

S'informer

Qu’est-ce que la consignation ?


La consignation est le dépôt d’une somme d’argent (une partie du prix de d’acquisition du bien immobilier souhaité) fait par la personne publique débitrice afin de sécuriser l’opération demandée. Elle est à déposer auprès de la Caisse des dépôts, sur un compte bloqué en attendant l’issue d’une procédure judiciaire. Elle peut être demandée suite à tout obstacle de paiement.

Le notaire, au service des collectivités territoriales

La consignation en cas de préemption

En cas de préemption, la consignation est obligatoire lorsque le juge de l’expropriation a été saisit suite à un désaccord. Il faut donc au préalable une saisine du juge de l’expropriation.

Consignation suite à un désaccord 

En cas de préemption, le titulaire du droit de préemption (la mairie par exemple) doit consigner une somme égale à 15 % de l’évaluation réalisée par le directeur départemental des finances publiques. 
Il doit notifier la preuve de consignation au tribunal et au propriétaire dans le délai de 3 mois à partir de la saisine du juge.

Le délai pour consigner le prix de vente en cas de préemption

Depuis le 27 mars 2014, en cas d'acquisition d'un bien par voie de préemption, le prix devra être réglé dans les 4 mois qui suivent :
•    soit la décision d'acquérir le bien au prix indiqué par le vendeur ou accepté par lui,
•    soit la décision définitive de la juridiction compétente en matière d'expropriation,
•    soit la date de l'acte ou du jugement d'adjudication.

Lorsque le prix du bien préempté a été fixé, le titulaire du droit de préemption dispose de deux possibilités:
•    soit payer le prix ;
•    soit le consigner en cas d'obstacle au paiement.

Dans ce cas, la consignation doit intervenir dans un délai de 4 mois (C. urb., art. L. 213-14, al. 2). 
En l'absence de paiement ou de consignation du prix dans les 4 mois, le vendeur pourra aliéner librement son bien ( C. urb., art. L. 213-14, al. 3). 

Une fois le prix consigné, une notification obligatoire dans les 3 mois

Cette notification doit être adressée au juge et au propriétaire vendeur. Le délai de trois mois court à compter de la saisit du juge. A défaut, la personne publique est réputée avoir renoncé à l’acquisition ou à l’exercice du droit de préemption (Article L213-4-1 du Code de l’urbanisme).

Ainsi, une commune qui avait effectivement consigné la somme requise, informé dans les 3 mois de sa saisine le juge compétent en matière d'expropriation mais qui avait assuré la notification auprès des propriétaires plus de 5 mois après ladite saisine, est réputée avoir renoncé à préempter ( Cass. 3e civ., 9 mai 2012, n° 11-12.551, n° 504 FS - P + B).

La déconsignation en cas de préemption

La libération des fonds consignés ne peut être effectuée que lorsque le titulaire du droit de préemption a renoncé à l'acquisition ou à l'exercice du droit de préemption ou après le transfert de propriété ( C. urb., art. L. 213-4-2).

Les recours possibles

La décision de consignation n'est pas susceptible de recours devant le juge administratif. C’est le juge judiciaire qui est compétente en matière ( CAA Paris, 1re ch., 3 juill. 2009, n° 07PA05027 : Petites affiches, 12 févr. 2010, p. 11).

Transfert de la jouissance du bien à la date du paiement du prix ou de sa consignation

L'ancien propriétaire vendeur garde la jouissance de son bien immobilier préempté jusqu'au paiement intégral du prix ou jusqu'à sa consignation ( C. urb., art. L. 213-15). Autrement dit, la consignation du prix de vente par l’expropriant (la mairie par exemple) vaut règlement du prix de vente. Il y a alors transfert de propriété et le bien est vendu.

La consignation en cas d’expropriation

Dans tous les cas d'obstacle au paiement, l'expropriant peut en principe consigner si certaines règles sont respectées.

La consignation pour tous obstacles de paiement en cas d’expropriation

En cas d’expropriation, la consignation intervient si l’indemnisation n’est pas immédiatement possible.

L’expropriation ne peut intervenir et n'est légale que si elle présente un but d’utilité publique (par exemple la construction d’une route ou d’un gymnase) et moyennant une juste et préalable indemnité au propriétaire. 

L'exproprié doit être informé de la consignation opérée par l’expropriant. Cette information doit être donnée par lettre recommandée avec demande d'avis de réception (C. expr. art. R 323-9) ou par un autre moyen assurant à l'exproprié une information équivalente (Cass. 3e civ. 19-7-2000 n° 98-20.938 : AJDI 2001 p. 154). Ce devoir d’information reste essentiel afin d’assurer une consignation valable légalement. 

Exemple des cas de consignation en cas d’expropriation

Dans tous les cas d'obstacle au paiement, l'expropriant peut, sous réserve des articles R. 323-6, R. 323-7, R. 323-11 et R. 323-12 du Code de l'expropriation pour cause d'utilité publique, prendre possession en consignant le montant de l'indemnité. C’est ce que dispose l’article R323-8 du Code de l'expropriation pour cause d'utilité publique.
« Il en est ainsi notamment :
1° Lorsque les justifications mentionnées aux articles R. 323-1 et R. 323-2 ne sont pas produites ou sont jugées insuffisantes par l'expropriant ;
2° Lorsque le droit du réclamant est contesté par des tiers ou par l'expropriant ;
3° Lorsque l'indemnité a été fixée d'une manière hypothétique ou alternative, notamment dans le cas prévu à l'article L. 322-12 ;
4° Lorsque sont révélées des inscriptions de privilèges, d'hypothèques ou d'un nantissement grevant le bien exproprié du chef du propriétaire et, le cas échéant, des précédents propriétaires désignés par l'expropriant dans sa réquisition ;
5° Lorsqu'il existe des oppositions à paiement ;
6° Lorsque, dans le cas où l'expropriant est tenu de surveiller le remploi de l'indemnité, il n'est pas justifié de ce remploi ;
7° Lorsqu'il n'est pas justifié soit de la réalisation de la caution mentionnée à l'article L. 321-2, acceptée par le nu-propriétaire ou jugée suffisante par une décision de justice opposable à ce dernier, soit de la renonciation expresse du nu-propriétaire au bénéfice de la caution prévue dans son intérêt ;
8° Lorsque, l'exproprié n'ayant pas la capacité de recevoir le paiement, ce dernier n'est pas réclamé par son représentant légal justifiant de sa qualité ;
9° Lorsque, l'exproprié étant décédé après l'ordonnance d'expropriation ou la cession amiable, les ayants droit ne peuvent justifier de leur qualité ;
10° Lorsque l'exproprié refuse de recevoir l'indemnité fixée à son profit ;
11° Lorsque l'exproprié ou, le cas échéant, ses ayants droit, n'étant pas en mesure de percevoir l'indemnité, ont demandé que son montant soit consigné. »

Les litiges relatifs à la contestation de la consignation sont de la compétence du juge de l'expropriation.

L’indemnité est fixée à l’amiable ou par le juge de l’expropriation. 

Comment se déroule l’expropriation ? 

La procédure d’expropriation se déroule en deux phases : la phase administrative et la phase judiciaire (voir notre article sur l’expropriation ici).

Comment consigner les indemnités d’expropriation ?

La demande de consignation peut se faire en ligne. Elle peut être demandée par une collectivité locale, une entreprise publique locale (sociétés d’économie mixte, sociétés publiques locales), un établissement public foncier (toutes autorités expropriantes) ou encore un notaire. Une fois le prix consigné, l’ouvrage public peut être réalisé. 

Rôle de la Caisse des dépôts et consignations

Lorsque l'indemnité a été consignée, la Caisse des dépôts et consignations assure le paiement de l'indemnité à l'exproprié désigné, sous sa responsabilité, par l'expropriant. Lorsque le paiement lui est demandé par les ayants droit de l'exproprié, elle ne l'effectue que sur justification de leur qualité (C. expr. art. R 323-10). Un acte de notoriété rédigé par votre notaire peut être réclamé. 

Comment procéder à la déconsignation ?

La déconsignation se fait également en ligne à la demande de l’administration. Elle s’accompagne d’un arrêté ou une décision administrative.

 

Le rôle du notaire dans la consignation

Que vous soyez un particulier ou que vous représentiez une collectivité locale, n’hésitez pas à vous rapprochez-vous de votre notaire. Il vous conseillera et vous expliquera les procédures dans leur globalité. Il tentera également de trouver une solution au blocage de la situation.


Bien souvent, c’est l’absence d’interlocuteur médian qui engendre les difficultés. Votre notaire est cet interlocuteur : il écoutera les positions des uns et des autres et vous proposera une solution adaptée qui vous donnera satisfaction.