L’adoption est un lien de filiation créé par jugement. Il existe deux types d’adoption en France, l’adoption simple et l’adoption plénière.
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L'adoption simple
A la différence de l’adoption plénière qui supprime tout lien juridique avec la famille d’origine, l’adoption simple confère à l’adopté une filiation qui s’ajoute à sa filiation d’origine (364 C. civ.. L’adopté conserve ses droits dans sa famille d’origine; il est donc lié aux deux familles.
L’adoption internationale (qui peut être simple ou plénière), obéit à des règles particulières et ne sera donc pas envisagée ici.
Nouveauté : la loi n° 2022-219 du 21 février 2022 visant à réformer l'adoption a apporté des modifications substantielles aux articles du Code civil et du Code de l’action sociale et des familles (CASF) régissant les deux types d’adoption ainsi que le statut des pupilles. Cette réforme est entrée en vigueur le 23 février 2022. Elle poursuit trois objectifs principaux : rendre plus d'enfants adoptables, sécuriser les parcours pour garantir le respect des droits des enfants et simplifier les démarches pour les parents adoptants.
Quel régime d'adoption pour quelle situation ?
Emission "Club du Droit" du 7 juillet 2020
Dans quelles conditions une adoption simple est-elle possible ?
Les conditions relatives à l’adoptant sont les mêmes que pour ‘l’adoption plénière. En revanche les conditions relatives à l’adopté diffèrent.
Conditions relatives aux adoptants
Recours à l’adoption simple individuellement ou en couple.
En présence d’un seul adoptant, les conditions sont les suivantes (art. 361 renvoyant à 343-1 C. civ.):
● être âgé de plus de 26 ans (28 ans avant la réforme) sauf en cas d’adoption de l’enfant du conjoint, partenaire ou concubin (art. 361 renvoyant à 343-2 C. civ.),
● si l’adoptant est marié ou pacsé, obtenir le consentement de son conjoint ou partenaire .
Dans le cas d’un couple adoptant, les conditions sont les suivantes (art. 361 renvoyant 343 C. civ.) :
● être mariés (non séparés de corps) ou, depuis la loi du 21 février 2022, pacsés ou concubins. Les membres du couple peuvent être de sexe différent ou de même sexe ;
● avoir plus de 26 ans ou être en mesure d’apporter la preuve d’une vie commune depuis au moins 1 ans (28 ans et 2 ans de vie commune avant la réforme).,
Différence d’âge entre l’adoptant et l’adopté (art. 361 renvoyant 344 C. civ.)
L’adoptant (ou les adoptants) doit avoir en principe quinze années de plus que l’enfant qu’il veut adopter. Dans le cas particulier de l’adoption de l’enfant du conjoint, l’écart d’âge minimum exigé entre l’adoptant et l’adopté est réduit à 10 ans.
Le juge peut toutefois accorder des dérogations pour un écart d’âge plus faible, s’il y a de justes motifs.
Conditions relatives aux adoptés
Âge de l’adopté
Contrairement à l’adoption plénière, l’adoption simple est permise quel que soit l'âge de l'adopté, il peut donc être mineur ou majeur (3art. 60 C. civ.).
Néanmoins, si l’adopté a plus de treize ans, son consentement est nécessaire et doit être recueilli par un notaire. Il doit également consentir au changement de son prénom et nom de famille.
Nouveauté : lorsque l’enfant de plus de treize ans (ou le majeur protégé) est hors d’état de donner son consentement, le tribunal peut malgré tout prononcer l’adoption si elle est conforme à son l’intérêt de l’adopté (art. 361 renvoyant à 348-7 C. civ.).
Quels sont les personnes adoptables ?
Les enfants pouvant faire l’objet d’une adoption simple sont (art. 361 du C. civ. renvoyant à l’article 347 C. civ.) :
● les pupilles de l’Etat,
● les enfants dont les parents ou le tuteur ont accepté l’adoption,
● les enfants judiciairement déclarés délaissés,
Un majeur peut également faire l’objet d’une adoption simple.
De plus s’il est justifié de motifs graves, l’adoption simple d’un enfant ayant fait l’objet d’une adoption plénière est possible (art. 360 C. civ.).
Enfin, un enfant précédemment adopté par une seule personne, en la forme simple ou plénière, peut l'être une seconde fois, par le conjoint, partenaire lié par un pacs ou concubin de cette dernière en la forme simple (C. civ. art. 360, al. 3 C. civ). Il n’est pas nécessaire de justifier de motifs graves.
Les empêchements à l’adoption
Nouveauté : l'adoption entre ascendants et descendants en ligne directe et entre frères et sœurs est prohibée. Toutefois, le tribunal peut la prononcer si du fait de certains motifs graves, elle est dans l'intérêt de l'adopté (art. 361 renvoyant à 343-3 du C. civ.).
Quelle est la procédure pour une adoption simple ?
Le placement de l’enfant (art. 361-1 C. civ.)
La réforme de 2022 a étendu la procédure de placement des l’enfants à l’adoption simple pour les pupilles de l’Etat et ceux judiciairement déclarés délaissés.
La demande d’agrément
Le ou les adoptant doivent obtenir un agrément lorsque l’adopté est pupille de l’Etat ou un enfant étranger qui n’est pas l’enfant du conjoint, partenaire ou concubin (art. 361 renvoyant à 353-1 C. civ.).
Cet agrément est délivré par le président du Conseil départemental -l’ASE- (art. L 225-1 CASF).
La réforme de 2022 rappelle que "L'agrément a pour finalité l'intérêt des enfants qui peuvent être adoptés. Il est délivré lorsque la personne candidate à l'adoption est en capacité de répondre à leurs besoins fondamentaux, physiques, intellectuels, sociaux et affectifs” (L 225-2 du CASF).
Autre nouveauté, “L'agrément prévoit une différence d'âge maximale de cinquante ans entre le plus jeune des adoptants et le plus jeune des enfants qu'ils se proposent d'adopter. Toutefois, s'il y a de justes motifs, il peut être dérogé à cette règle […]” (art. L 225-2 CASF).
Enfin la loi du 22 février 2022 met en place une préparation des candidats à l’agrément aux enjeux de l’adoption et des besoins de l’enfant adoptable (art. L. 225-3 CASF).
Après la demande d’agrément et sa confirmation, le dossier est instruit dans les 9 mois. Le projet d’adoption fait l'objet d’une évaluation sociale et psychologique. L’agrément est délivré pour 5 ans. Tout refus d’agrément doit être motivé.
La requête en adoption (art. 361 C. civ, 353 C. civ.)
L’adoptant forme une requête auprès du tribunal judiciaire.
Bon à savoir : le recours à un avocat est obligatoire lorsque l’enfant a été recueilli après ses 15 ans (art. 1168 CPC).
Le tribunal doit se prononcer dans un délai de 6 mois, et vérifier si les conditions de la loi sont remplies et si l’adoption est conforme à l’intérêt de l’enfant.
L’adoption est prononcée par jugement.
L’adoption simple fait l’objet d’une mention en marge de l’acte de naissance de l’enfant adopté, sans le remplacer (art. 362 C. civ.).
Quels sont les effets d'une adoption simple ?
Double filiation
Contrairement à l’adoption plénière, l’adoption simple ne rompt pas les liens entre l’adopté et sa famille d’origine, donc les droits et obligations envers celle-ci (obligation alimentaire subsidiaire, droit à la succession, etc.). Une fois qu’elle est prononcée, les deux liens de filiation coexistent : l'adopté a deux familles.
Autorité parentale
Lorsque l’adopté est mineur, c’est l’adoptant qui exerce l’autorité parentale.
Si l’enfant adopté est l’enfant du conjoint, partenaire pacsé ou concubin de l’adoptant, l’autorité parentale est exercée en commun sous réserve qu’une déclaration conjointe soit déposée au greffe du tribunal judiciaire. Dans le cas contraire, seul le conjoint de l’adoptant exerce l’autorité parentale (art. 365 C. civ.).
Obligation alimentaire
L’adoption simple fait naître une obligation alimentaire entre adoptant et adopté. Les parents biologiques restent tenus d’une obligation alimentaire à l’égard de leur enfant s’il ne peut les obtenir de son parent adoptant (art. 367 C. civ.)
Adoption simple et droit des successions
L'adopté a vocation à hériter dans ses deux familles. D’une part, il conserve ses droits successoraux dans sa famille d’origine. D’autre part, il acquiert la qualité d’héritier réservataire à l’égard des grands-parents adoptifs. Toutefois l'adopté et ses descendants n'ont pas la qualité d’héritier réservataire à l’égard des grands-parents adoptifs, qui peuvent donc les déshériter (art. 368 et 368-1 C. civ.).
En ce qui concerne les droits de succession, en principe il n’est pas tenu compte du lien créé par l’adoption simple pour le calcul des droits de succession. L’impôt est déterminé en fonction du lien de parenté éventuel de l’enfant avec son adoptant. A défaut, l’adopté sera imposé à 60%, comme toute personne non parente.
Cependant, par exception l’adopté bénéficie des mêmes droits de succession que les enfants biologiques de l’adoptant dans certains cas énoncés à l’article 786 du Code général des impôts et notamment:
- enfant issu d’un premier lit du conjoint de l’adoptant,
- adoptés mineurs au moment du décès de l'adoptant,
- adoptés majeurs qui, soit dans leur minorité et pendant cinq ans au moins, soit dans leur minorité et leur majorité et pendant dix ans au moins, auront reçu de l'adoptant des secours et des soins non interrompus au titre d'une prise en charge continue et principale
Nom de famille et prénom de l’adopté (art. 363 C. civ.)
En principe l'adopté conserve son nom d'origine auquel est ajouté le nom de l'adoptant. Si l'adopté a plus de treize ans ( 18 ans avant la réforme de 2022), cette adjonction suppose son consentement.
Le tribunal peut toutefois, à la demande de l'adoptant et avec le consentement de l'adopté s'il a plus de 13 ans, décider que l'adopté ne portera que le nom de l'adoptant.
Le tribunal peut aussi décider que l’adopté conservera son seul nom de famille en cas d’adoption de l’enfant du conjoint, partenaire ou concubin.
Enfin, le tribunal peut également, à la demande du ou des adoptants, modifier le prénom de l'enfant. Depuis la loi du 21 février 2022, si l’adopté a plus de treize ans, son consentement est requis ( l'art. 361 C. civ. renvoie à l'art. 357, al. 7 C. civ.).
L’adoption simple est-elle révocable ?
Contrairement à l’adoption plénière, l’adoption simple peut faire l’objet d’une révocation pour motifs graves (art. 370 C. civ.). C’est au tribunal judiciaire d’apprécier souverainement la gravité des motifs invoqués par le demandeur à la révocation (alcoolisme grave, violence... Une simple mésentente ou un éloignement ne constituent pas un motif suffisamment grave). Si l’adopté est majeur, la révocation peut être demandée par ce dernier ou par l’adoptant. S’il est mineur, seul le ministère public peut former une telle demande.
La révocation prend effet à la date de la demande et fait cesser pour l’avenir tous les effets de l’adoption, à l’exception de la modification des prénoms. (art. 370-2 C. civ.).
Le jugement de révocation est mentionné en marge de l’acte de naissance (art. 370-1 C.civ.)
Adopter l'enfant de son conjoint
Maître Matthieu Fontaine répond à Estelle Denis dans RMC Story :