Tutelle, curatelle ou sauvegarde de justice : différences et points communs

Mis Ă  jour le Mardi 28 mai 2024

" Toute personne dans l’impossibilité de pourvoir seule à ses intérêts en raison d’une altération, médicalement constatée, soit de ses facultés mentales, soit de ses facultés corporelles de nature à empêcher l’expression de sa volonté peut bénéficier d’une mesure de protection juridique " (’article 425 du Code civil). 

Il existe trois grandes mesures de protection judiciaire : la tutelle, la curatelle et la sauvegarde de justice. A côté de ces mesures traditionnelles, l’habilitation familiale permet aux familles, sans avoir recours aux mesures judiciaires, de protéger leurs proches vulnérables.

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Quels sont les points communs entre la tutelle, la curatelle et la sauvegarde de justice ?

Les principes directeurs 

Toute protection doit être respectueuse des libertés individuelles, des droits fondamentaux et de la dignité de la personne. Ces trois mesures respectent donc les mêmes principes fondamentaux de :

  • nĂ©cessitĂ© : Seule l'altĂ©ration des facultĂ©s, mĂ©dicalement constatĂ©e et mettant la personne dans l'impossibilitĂ© de pourvoir seule Ă  ses intĂ©rĂŞts, peut justifier une mesure de protection judiciaire
  • subsidiaritĂ© : le juge ne peut pas ordonner une telle mesure si la protection de la personne ne peut pas ĂŞtre assurĂ©e par un mandat de protection future conclu par cette dernière, ou par les règles de reprĂ©sentation ou celles prĂ©vue entre Ă©poux.
  • ProportionnalitĂ© : la protection doit ĂŞtre adaptĂ©e Ă  la situation du majeur et individualisĂ©e en fonction du degrĂ© d'altĂ©ration de ses facultĂ©s

La Procédure devant le juge pour toutes les mesures 

Aux termes de l’article 430 du Code civil, la demande de placement sous une mesure de protection doit être effectuée par : la personne majeure à protéger ; son conjoint, son partenaire de PACS ou concubin, sauf si la communauté de vie a cessé ; ses descendants, ascendants, frères ou sœurs ; son entourage ; la personne qui exerce une mesure de protection juridique ou le procureur de la République.


NB : les services sociaux ou médicaux peuvent saisir le procureur de la République.


Ensuite, la personne à protéger doit être examinée par un médecin agréé qui établit un certificat médical à remettre au Juge des contentieux de la protection (article 431 du Code civil). 


La requête doit être adressée au Juge des contentieux de la protection au Tribunal judiciaire du lieu de résidence de la personne à protéger. Cette requête peut être faite au moyen du formulaire cerfa n°15891*03. Elle doit être accompagnée de documents tels l’acte de naissance de la personne à protéger, le certificat médical ou encore des documents sur le patrimoine de la personne à protéger.


NB : le recours à un avocat n’est pas obligatoire.


Si cela est possible, le juge auditionne la personne à protéger (article 432 du Code civil). Il peut aussi auditionner le médecin ou des proches, consulter des experts voire procéder à une enquête sociale. Après audience, le juge accepte la mesure de protection, la refuse ou en prononce une autre.


Il désigne une ou plusieurs personnes chargées de la mesure de protection, en priorité parmi les membres de la famille, et, si ce n’est pas possible, un professionnel. Dans le cadre de la tutelle, un conseil de famille peut être constitué. Un subrogé tuteur ou curateur peut être désigné. 


Un appel contre la décision du juge peut être interjeté dans les quinze jours de la notification du jugement. 


Pour davantage d’information sur chaque mesure, consultez nos fiches spécialisées. 

Quelles sont les différences de ces trois régimes de protection ? 

Ces mesures de protection se distinguent par le degré d’autonomie laissée à la personne protégée, par les modalités de mise en place et par leur objectif.

Différents degrés d’incapacité de la personne à protéger :

  • La sauvegarde de justice s’adresse aux personnes qui subissent une perte d’autonomie temporaire (article 433 du Code civil). C’est par exemple le cas d’une personne souffrant d’un traumatisme crânien ou d’une amnĂ©sie temporaire ;
  • La curatelle vise les personnes qui ont besoin d'ĂŞtre assistĂ©es ou contrĂ´lĂ©es d'une manière continue dans les actes importants de la vie civile ;
  • La tutelle concerne les personnes nĂ©cessitant d’être reprĂ©sentĂ©es de manière continue dans les actes de la vie civile Ă  cause d’une altĂ©ration de leurs facultĂ©s mentales ou physiques durables. 

Conformément au principe de subsidiarité (article 428 du Code civil), le choix de la mesure doit correspondre aux besoins de la personne à protéger et ne doit pas la contraindre plus que nécessaire.

La procédure médicale possible pour la sauvegarde de justice

Contrairement à la tutelle et à la curatelle qui ne peuvent être mise en place que sur décision judiciaire, la mise sous sauvegarde de justice peut intervenir sur déclaration médicale auprès du procureur de la République (art. 434 du C. civ. et art. L.3211-6 Code de la santé publique). 

Cette déclaration peut être faite par le médecin traitant. Accompagnée d’un avis conforme d’un psychiatre, elle vaut mise sous sauvegarde d’office.

Le médecin d’un établissement de santé, d’un hôpital des armées ou d’un établissement social ou médico-social, qui constate que la personne qui reçoit les soins a besoin d’être protégée dans les actes de la vie civile en raison de l’altération de ses facultés, a l’obligation de faire une déclaration au procureur de la République. La déclaration place la personne sous sauvegarde de justice. 

Cette mesure prend fin sur déclaration faite au procureur de la République, sur initiative du procureur de la République, par l’ouverture d’une mesure de tutelle ou de curatelle et à l’expiration du délai ou dès que les actes pour lesquels elle a été ordonnée ont été accomplis.


Il n’y a pas d’obligation d’information de la personne protégée.
 

En raison de ce public différent, les mesures n’ont pas le même effet selon la contrainte qu’elles imposent :

  • Avec la sauvegarde de justice, le majeur protĂ©gĂ© conserve l'exercice de ses droits et notamment celui d’accomplir tous les actes exceptĂ©s ceux confiĂ©s par le juge au mandataire ;spĂ©cial ; Le divorce par consentement mutuel n’est pas non plus possible. 
  • Avec la curatelle simple, le majeur protĂ©gĂ© peut gĂ©rer et administrer ses biens, mais il est assistĂ© par le curateur pour les actes de disposition (vente, emprunt, etc.). La curatelle est modulable selon l’autonomie de la personne Ă  protĂ©ger ;
  • Avec la curatelle renforcĂ©e, le curateur perçoit les revenus du majeur, règle les dĂ©penses et laisse Ă  disposition du majeur l’excĂ©dent sur un compte ouvert Ă  son nom. Aussi, le juge peut autoriser le curateur Ă  conclure seul un contrat pour le logement du majeur (article 472 du Code civil) ;
  • Avec la tutelle, la plupart des actes sont directement rĂ©alisĂ©s par le tuteur. Il reprĂ©sente le majeur protĂ©gĂ© dans les actes de la vie civile. Il perçoit les revenus de la personne et s’occupe de gĂ©rer ses dĂ©penses.


Dans les trois cas, la personne protégée conserve le droit de vote. En revanche, une personne sous curatelle ou tutelle ne peut plus être élue.


Les mesures n’ont également pas le même but  :

  • La sauvegarde de justice est une mesure urgente et temporaire (ex : une personne souffrant d’un traumatisme crânien). Elle a une durĂ©e d’un an maximum et est renouvelable une seule fois par le juge des contentieux de la protection (article 439 alinĂ©a 1er Code civil). Elle peut ĂŞtre instaurĂ©e en attendant la mise en place d’une curatelle ou d’une tutelle  ; 
  • La curatelle est mise en place pour 5 ans maximum renouvelables pour la mĂŞme durĂ©e (article 441 et 442 du Code civil). Elle peut ĂŞtre renouvelĂ©e pour une durĂ©e plus longue si l’altĂ©ration des facultĂ©s de la personne apparaĂ®t irrĂ©mĂ©diable, mais qui ne doit pas excĂ©dant 20 ans ;
  • La tutelle peut ĂŞtre mise en place pour 5 ou 10 ans si l’altĂ©ration des facultĂ©s de la personne n’apparaĂ®t manifestement pas susceptible de connaĂ®tre une amĂ©lioration. En cas de renouvellement, la durĂ©e ne doit pas excĂ©der 20 ans (article 441 et 442 du Code civil)..

Imaginons que votre parent soit malade et qu’il subisse une altération de ses facultés pendant le traitement, celui-ci peut être placé sous sauvegarde de justice. En revanche, si l’altération devient permanente, les autres mesures de protection sont plus adaptées.